La foule des grands jours avait rendez-vous pour assister à la conférence de presse de "Megalopolis", ce vendredi à Cannes.
Alors qu'il était apparu affaibli la veille sur le tapis rouge, Francis Ford Coppola s'est montré alerte et plein d'humour.
Si les critiques prédisent déjà l'échec de son film, le maître n'en a cure, et annonce qu'il est déjà en train d'en écrire un autre.

Au lendemain d’une projection officielle qui s’est soldée par dix minutes de standing-ovation au Palais des Festivals, l'immense Francis Ford Coppola, 85 ans, est venu défendre son Megalopolis ce vendredi en conférence de presse. La critique a beau être (très) mitigée, la salle était pleine à craquer pour entendre le cinéaste s’exprimer au sujet de ce projet qu’il couve depuis quatre décennies et qu’il a financé avec ses deniers personnels.

Arrivé avec une bonne vingtaine de minutes de retard, l’octogénaire était accompagné des comédiens Adam Driver, Giancarlo Esposito, Nathalie Emmanuel, Aubrey Plaza, Laurence Fishburne a ou encore Jon Voight. De son fils Roman, mais aussi de Romy et Cosima, ses petites-filles qui l'ont aidé à rejoindre son siège. "Quand je suis venu ici pour Apocalpyse Now (Palme d'or en 1979 - ndlr), j’avais Sofia sur les épaules", a-t-il rappelé aux plus anciens en prenant le micro.

Nos politiciens nous ont conduit au stade où nous risquons de perdre notre République
Francis Ford Coppola

Dans Megalopolis, fresque futuristico-kitsch de 2h18, Francis Ford Coppola met en scène New Rome, une cité décadente où un architecte visionnaire s’oppose à un maire qui privilégie les intérêts de ses soutiens. Difficile de ne pas y avoir un commentaire sur l’évolution de l’Amérique et des grandes démocraties. Ce que l’intéressé assume bien volontiers. "Un homme comme Donald Trump n'est pas actuellement au pouvoir. Mais il me semble qu’on assiste à une montée d'une néo-droite dans la tradition fasciste et que nos politiciens nous ont conduit au stade où nous risquons de perdre notre République", a-t-il estimé. 

"C'est effrayant parce que quiconque était vivant pendant la Seconde Guerre mondiale a vu les horreurs qui ont eu lieu, et nous ne voulons pas que cela se répète. Moi, je pense que c’est le rôle de l’artiste de faire la lumière sur ce qui se passe dans le monde (...) Ce ne sont pas les politiciens qui seront la réponse. Je pense que ce sont les artistes. Mon rêve, mon espoir, c’est que ce soient les artistes de notre pays qui fassent la lumière."

Cannes 2024 : la bande-annonce de "Megalopolis"Source : TF1 Info

À Hollywood, Francis Ford Coppola a depuis longtemps une réputation de franc-tireur, voire de génie incontrôlable sur un plateau, n’obéissant qu’à son instinct créatif, rarement aux requêtes des studios dont il s’est affranchi au fil de sa carrière. Pourrait-il être amené à retravailler Megalopolis dans les années à venir, comme il l’a fait par le passé avec Apocalypse Now ?

"Si je remonte mes fims, c’est parce qu’ils sont à moi", a-t-il rappelé à propos de sa société de production American Zoetrope. "J’ai remonté Apocalypse Now parce qu’il est à moi et que personne n’en voulait au départ. Conservation Secrète, je l’aime comme ça. Le Parrain, il y a une scène que je pourrais ajouter, a-t-il révélé, provoquant un frisson dans la salle parmi les fans de l'un des plus grands films de tous les temps.

Alors qu’il était apparu affaibli la veille sur le tapis rouge, s’aidant d’une canne pour marcher, le maître s’est montré alerte et incisif dans ses réponses, n’hésitant pas à manier l’humour. "Je vous le promets, je serai encore là dans 20 ans", s’est-il amusé. "Et si je peux encore améliorer ce film, j’essaierai de le faire. Mais là, je sais que ce projet est terminé parce que j’ai déjà commencé à écrire un nouveau film." Un tacle à ceux qui prédisent la fin de sa carrière en cas d'échec au box-office ?

"Je m’en fous de l’argent", a-t-il encore répondu à une journaliste qui l’interrogeait sur sa fortune, après avoir été contraint de vendre une partie de ses activités dans les vignes en Californie pour financer Megalopolis à hauteur de 120 millions de dollars. "Mes enfants, sans exception, ont de merveilleuses carrières. Nous allons bien. Cela n’a pas d’importance. À vous tous ici : l’argent n’a pas d’importance. Ce qui est important, ce sont les amis. Un ami ne vous laissera jamais tomber. Alors que l’argent peut s’évaporer."


Jérôme VERMELIN à Cannes

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